Ecritures chorales


 

Semblable à une nuée d’oiseaux qui évoluent ensemble dans un synchronisme parfait, sans que pour autant l’on puisse déceler un leader défini, la danse chorale est une approche sensible du mouvement avec un sens très affuté du rapport à l’espace et à l’autre. C’est aussi une étude ludique du sens de la responsabilité́ puisque le leadership du groupe est fluctuant, selon le hasard des évolutions, et peut amener chacun, tour à tour, à prendre la responsabilité́ du groupe tout comme celui de s’y fondre, sans pour autant perdre son individualité́.

Dans cette approche humaniste de la danse issue des recherches de Rudolf Laban et revisitée dans une optique contemporaine, il suffit d’être animé par le désir de vivre une expérience ludique de groupe, porté par la joie de « l’être ensemble » et par l’ivresse de l’air. C’est une façon de mettre à profit toute l’éducation du corps du danseur traduite dans le corps du groupe. Différente des flashmobs, la choralité met en avant la générosité du propos et le concept de leadership mobile.

Inspirée par les recherches de Laban autour de la choralité, Marilén Iglesias-Breuker développe en 1996/98 une approche du « danser ensemble » basée sur les principes labaniens du mouvement appliqués au groupe: «  Lors de recherches aux archives de la danse de Cologne, j’ai constaté l’importance du groupe dans les travaux de Laban. C’est sur lui qu’il avait tout d’abord expérimenté les principes du mouvement. En étudiant des différents documents (textes, photos.), j’ai pu approfondir les méthodes de travail qui étaient employées et les réactualiser."

Dans les danses de chœur, on aborde des principes d’improvisation de groupe qui se fondent sur des contraintes très précises dans le temps, l’espace, mais laissent une part d’interprétation personnelle à chacun. Il s’agit d’un cadre à l’intérieur duquel chacun va pouvoir produire ses propres gestes, concentré sur sa relation aux autres et à l’espace et non sur des pas à reproduire. "La conséquente immédiate est qu’on se sent plus à l’aise car chacun ressent qu’il fait partie d’une globalité. Il ne s’agit pas d’essayer d’être ensemble en dépendance d’une musique ou d’un rythme extérieur. On est ensemble parce qu’on danse ensemble, on regarde l’autre, on a conscience de l’autre. On est dans la sensation présente pas dans la mémorisation."

Cette expérience reprend en ce sens les intentions et l’univers de la compagnie Le Guetteur en se fondant sur l’organicité du mouvement à l’instar du vol des oiseaux. Quand l’oiseau se présente dans le paysage, il devient le paysage tout entier. Quand le groupe danse choral se déploie il devient de même le paysage tout entier attentif et vibrant à l’unisson.